Lettre ouvert au Comité exécutif de l’Université Laval
Monsieur le recteur,
Mesdames, Messieurs,
Après trois semaines de grève, les chargés de cours ont été convoqués mardi pour se prononcer sur «l’offre globale et finale» que vous avez demandé à votre Comité de négociation de nous présenter. Sans la moindre proposition de protocole de retour au travail, vous espériez que nous allions accepter une offre qui manifeste, en fait, du mépris.
Dans tous les journaux, nous avons pu lire que vous nous proposiez un rattrapage salarial de 16, 84%. Lorsque j’ai lu ce chiffre et votre mention nous assurant que vous avions la parité avec les autres chargés de cours de la Province, j’ai poussé un soupir de soulagement. «Enfin, me suis-je dit, ils ont compris! Enfin, je vais revoir mes étudiants, reprendre mes cours et terminer la session aussi bien que possible».
Quelle naïveté! Lorsque j’ai lu avec soin vos demandes et vos refus à nos propres demandes, j’ai été, comme 80 % de mes collègues les plus touchés par cette grève, déçue et révoltée.
Vous vous êtes bien gardés de préciser que, pour le même salaire (ils n’ont pas de hausse de salaire), les chargés d’enseignement allaient devoir assurer 10% de plus en tâches liées. Vous avez tu le fait que vous ne vouliez pas que nous soyons systématiquement représentés dans les comités de programme où nous enseignons (les étudiants et les professeurs le sont, eux). Tu également le fait que, lorsqu’une unité crée un comité de travail, vous ne vouliez pas nous payer pour les heures effectuées (il est vrai que le bénévolat est une fort belle activité). Tu aussi le fait que, lorsqu’un étudiant handicapé demande plus d’encadrement de notre part, vous ne vouliez pas nous rémunérer en conséquence. Et la clause «remorque», qui assurerait que nos conditions évoluent systématiquement comme celles des autres chargés de cours de la Province? Refusée ! Cela parmi tant d’autres rebuffades…
En fait, vous refusez avec un soin maniaque tout ce qui peut contribuer à l’intégration des chargés de cours. Ce à quoi vous ne semblez pouvoir vous résigner, c’est nous considérer comme partie prenante de l’Université, enseignants à part entière. La réalité des années 80 (où les chargés de cours n’étaient que des substituts temporaires) est révolue. Ce n’est plus cette situation qui prévaut aujourd’hui. Au lieu de faire de nous des alliés et d’assurer ainsi le fonctionnement de l’université, vous nous combattez, vous cherchez à nous écraser. Au lieu de nous donner les moyens (et ils ne sont pas que financiers) d’œuvrer pour nos étudiants, vous nous donnez des conditions d’encadrement désuètes. Que diriez-vous de créer des passerelles pour permettre aux chargés de cours qui ont les diplômes appropriés d’avoir la priorité pour les postes de professeurs ? Allez-vous commencer une crise d’urticaire à cette seule idée ?
Ce mépris que nous avons ressenti ne peut rien vous apporter. Comment se fait-il que vous persévériez dans cette voie? Rien n’a changé depuis trois ans. Peut-on espérer que votre regard sur nous évolue enfin? Ou faudra-t-il une autre équipe, une autre tête à l’Université pour qu’elle se dirige vers plus de respect ?
Pensez-y. Dans trois ans, nous serons encore là.
Anne Fonteneau, chargée de cours, et fière de l’être